RANARISON Tsilavo de NEXTHOPE accuse Solo d’abus de biens sociaux alors que RANARISON a accusé lui même réception des produits envoyés par Solo

La loi régissant les sociétés commerciales à Madagascar définit l’abus des biens sociaux comme suit :

Art. 931 : Seront punis d’une amende de vingt-cinq (25) millions ou cinq millions d’Ariary à deux cents (200) millions de FMG ou quarante millions d’Ariary, et de deux mois à deux ans d’emprisonnement, ou de l’une de ces deux peines seulement, le gérant de la société à responsabilité limitée, les administrateurs, le président-directeur général, le directeur général, l’administrateur général ou l’administrateur général adjoint qui, de mauvaise foi, font des biens ou du crédit de la société un usage qu’ils savaient contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles, matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre personne morale dans laquelle ils étaient intéressés, directement ou indirectement.

Cet article, qui définit l’abus des biens sociaux, est à la base de l’accusation portée par Ranarison Tsilavo contre son ancien patron et associé, Solo. Selon Ranarison Tsilavo, gérant fondateur de Nexthope depuis novembre 2010, cela peut être interprété ainsi :

« Solo, gérant de Connectic, a, de mauvaise foi, utilisé les biens de la société (en réalisant des virements internationaux) à des fins contraires à l’intérêt de celle-ci, pour favoriser une autre entité (la société Emergent) dans laquelle il avait un intérêt direct. »

En effet, près de 3 663 933 565,79 Ariary, soit l’équivalent de 1 047 060 euros, auraient été envoyés par Connectic à la société Emergent en France. Selon Ranarison Tsilavo, ces 72 virements ont été effectués sur la base de fausses factures, et les fonds auraient été accaparés par Solo à titre personnel. Il affirme ainsi que ces virements n’avaient aucune contrepartie, ce qui constituerait, selon lui, un abus des biens sociaux.

Cependant, cette accusation semble paradoxale, car Ranarison Tsilavo reconnaît lui-même dans un email du 24 avril 2012 que Solo a bien expédié des équipements d’une valeur de 1 361 121,68 USD et 297 032,93 EUR à Connectic.

Il est important de distinguer entre factures fictives et fausses factures, car ces termes, bien que souvent utilisés de manière interchangeable, ont des significations spécifiques.

Facture fictive : Il s’agit d’une facture émise sans qu’aucune prestation de service ou livraison de biens n’ait eu lieu. Autrement dit, la transaction mentionnée est totalement inexistante. Ce type de facture est souvent utilisé pour obtenir indûment des avantages fiscaux ou pour dissimuler des fonds.

Fausse facture : Ce terme est plus général et englobe toute facture comportant des informations inexactes ou trompeuses. Cela peut inclure des factures fictives, mais aussi des factures de complaisance, où la transaction a eu lieu mais les détails sont modifiés pour servir des intérêts particuliers.

Dans le contexte de Ranarison Tsilavo et de Nexthope, l’évocation de factures fictives suggère que des factures auraient été émises sans correspondre à des transactions réelles, ce qui pourrait indiquer une tentative de dissimulation ou de fraude. Cette distinction est cruciale, car les implications légales et fiscales varient selon le type de facture en question.

Pour aller plus loin : 

La caractérisation de l’infraction d’abus de biens sociaux

Outre la constitution d’un élément matériel et d’un élément moral, le délit d’abus de biens sociaux suppose l’existence de conditions préalables.

A. Les éléments préalables

Pour être caractérisé, le délit d’abus de biens sociaux exige que l’infraction ait été commise par un dirigeant de société à risque limité et concerne un bien appartenant à la société.

  1. Un dirigeant de société à risque limité

Le législateur a choisi de ne protéger que les sociétés à risque limité, permettant ainsi la poursuite de leurs dirigeants, et uniquement de ces derniers, pour abus de biens sociaux. Comme pour de nombreux délits sociétaires, l’abus de biens sociaux est un délit de fonction. Par conséquent, il doit avoir été commis par un dirigeant, en l’occurrence, Solo.

  1. Un objet appartenant à la société : les biens de la société

L’abus de biens sociaux couvre tous les éléments du patrimoine social de la société — biens mobiliers et immobiliers, matériels comme immatériels. Le plus souvent, il s’agit des fonds sociaux.

Dans notre cas, Solo aurait effectué des virements internationaux sans contrepartie, appauvrissant ainsi la société Connectic.

Dans sa plainte déposée le 20 juillet 2015, accompagnée d’une demande d’arrestation et adressée directement au Procureur Général près de la Cour d’Appel d’Antananarivo, Ranarison Tsilavo accuse Solo d’abus de biens sociaux. Cette plainte a été traitée personnellement par le Procureur Général, bien que cette prérogative relève normalement du Procureur de la République et non du Procureur Général.

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C’est pourquoi le plaignant porte plainte contre Sieur Solo, domicilié à Antananarivo, pour fraude, détournement et recel de biens sociaux, escroquerie, faux et usage de faux, conformément aux articles 929, 930 et 931 de la loi 2003-036 sur les sociétés commerciales du 30 janvier 2004, régissant les infractions à la gérance, à l’administration et à la direction des sociétés, ainsi qu’aux articles 405, 150 et suivants du Code pénal malgache. Il sollicite également son arrestation.

Le plaignant se constitue partie civile et fixera ses dommages et intérêts à l’audience.

Le délit d’abus de biens sociaux est constitué lorsque ‘les gérants, de mauvaise foi, font des biens ou du crédit de la société un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils ont un intérêt direct ou indirect’. »

Pour Ranarison Tsilavo, gérant fondateur de Nexthope depuis novembre 2012, les virements internationaux d’un montant total de 3 663 933 565,79 Ariary, soit l’équivalent de 1 047 060 euros, envoyés par Connectic à l’EURL Emergent en France, n’ont pas de contrepartie. Cette absence de contrepartie est invoquée comme fondement du délit d’abus de biens sociaux reproché à Solo, son ancien patron.

Pour empêcher Solo de se défendre, Ranarison Tsilavo a obtenu son placement en détention à la prison d’Antanimora le 29 juillet 2015. Solo y est resté pendant cinq mois jusqu’au verdict, qui le condamna à deux ans de prison avec sursis et au versement de 1,5 milliard d’Ariary de dommages et intérêts à Ranarison Tsilavo.

Cependant, Ranarison Tsilavo reconnaît que Solo a expédié des équipements d’une valeur de 1 361 121,68 USD et de 297 032,93 EUR à Connectic.

En avril 2012, une grève sans préavis éclata au sein de la société Connectic, et Ranarison Tsilavo a lui-même établi les éléments nécessaires à la comptabilité de la société. Dans un email daté du 24 avril 2012, envoyé à Solo et au responsable administratif de Connectic, il détaillait l’état des marchandises expédiées par Solo à Connectic à Madagascar.

Un tableau récapitulatif annuel des équipements achetés par Solo était joint à cet email, qui a été authentifié par un huissier en France et à Madagascar et déjà présenté à la chaîne pénale malgache.

Dans ce récapitulatif provenant de l’email de Ranarison Tsilavo, le plaignant reconnaît la réception des équipements envoyés par Solo, pour un montant de :

  • 1 361 121,68 USD, soit l’équivalent de 3 059 093 753 Ariary,
  • et 297 032,93 EUR, soit l’équivalent de 864 947 747 Ariary.

Cela représente un total de 3 924 041 500 Ariary en matériels expédiés par Solo.

Pour aller plus loin : dans son email du 24 avril 2012, Ranarison Tsilavo accuse réception des équipements envoyés par Solo.

La société Westcon Africa Comstor a facturé à Emergent un montant de 1 288 099,70 USD pour les achats d’équipements Cisco Systems, lesquels ont été expédiés à Madagascar pour Connectic par le biais du transitaire Midex (Orly, France). Ces envois sont attestés par les factures émises par Westcon Africa Comstor

Pour aller plus loin :

Solo a expédié un total de 2 649 221,38 USD et 297 032,93 EUR d’équipements à Connectic.

Lorsque l’on additionne les factures de Westcon Africa et les achats effectués par Solo, on obtient un montant de 2 649 221,38 USD et 297 032,93 EUR, à comparer avec le montant supposé d’abus de biens sociaux mentionné dans la plainte de Ranarison Tsilavo.

Selon la plainte déposée par Ranarison Tsilavo, les virements internationaux effectués par Connectic à destination d’Emergent s’élèvent à environ 480 488 USD et 937 041 EUR.

Dans sa plainte assortie d’une demande d’arrestation, Ranarison Tsilavo évoque des virements internationaux totalisant 3 663 933 565,79 Ariary, fondés sur une lettre qu’il a adressée à Cisco Systems en novembre 2013. Cette lettre est annexée en pièce n°07 dans la plainte. »

Ces montants en devises sont plus explicites que ceux en ariary dans la plainte avec demande d’arrestation :

  • année 2009 : 657.729.177,36 ariary,
  • année 2010 ; 1.033.273.747,75 ariary
  • année 2011 : 1.537.643.639,36 ariary
  • année 2012 : 435.287.001,32 ariary

Solo est accusé d’abus de biens sociaux alors que la valeur des équipements envoyés à Madagascar dépasse les virements reçus de Connectic.

Le monde à l’envers !

D’après la plainte de Ranarison Tsilavo, les virements internationaux effectués par Connectic à Emergent s’élèveraient à environ 480 488 USD et 937 041 EUR, alors que Solo a, preuves à l’appui, envoyé en tout 2 649 221,38 USD et 297 032,93 EUR d’équipements à Connectic.

Et pourtant, c’est Solo qui est accusé d’abus de biens sociaux, avec la chaîne pénale de la Cour d’Appel d’Antananarivo qui soutient les affirmations de Ranarison Tsilavo.

Il n’y a pas de mystère : Ranarison Tsilavo a adressé sa plainte directement au Procureur Général d’Antananarivo, qui s’est empressé d’envoyer un soit-transmis à la police économique pour enquête. En une dizaine de jours seulement, Solo se retrouvait incarcéré à la prison d’Antanimora.

 

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